En
dépit de l’engouement toujours vif des inconditionnels de la 2 CV, les
ventes annuelles ont commencé à baisser dans les années 80, passant de 200 000
à moins de 100 000 dès 1983, moins de 50 000 en 1987, ce qui
conduisit à la fermeture de l’usine de Levallois à moins de 20 000 en
1989, avant la fermeture de la dernière usine productrice, Mangualde
(Portugal), en 1990.
Pourquoi ?
Les
normes internationales de plus en plus contraignantes rendirent de plus en plus
difficile l’adaptation de la 2 CV au monde contemporain. Les années 60
marquèrent le début des exigences réglementaires en matière de “sécurité
passive”, choc au mur à différentes vitesses par exemple. Il ne suffisait
plus que la 2 CV fût particulièrement douée en matière de sécurité
active – celle qui permet d’éviter l’accident (tenue de route,
freinage…) – ni d’avoir changé en 1965 le sens d’ouverture de ses portières
avant.
Dans
les années 70, on commença à parler de dépollution, avec un calendrier d’échéances
de plus en plus exigeantes. Ce n’est pas que la 2 CV, pauvre petite,
pollue beaucoup, mais on voulut imposer à son moteur Petit Poucet les mêmes
obligations qu’aux ogres. En 1981, on lui adapta bien un carburateur dépollué,
mais de nouvelles exigences imposaient de faire plus. Installer un pot
catalytique sur un moteur de 2 CV, ce n’est pas vraiment lui faciliter la
vie. A partir d’octobre 1987, la vente des 2 CV neuves fut interdite en
Suisse et en Allemagne, à l’adoption des normes US 83.
Ajouter
à cela le fait que la fabrication, étudiée dans les années 40, devenait de
plus en plus coûteuse par rapport aux normes robotisées et aux impératifs de
productivité des années 80 et 90. On objecte à cela que l’outillage devait
être depuis longtemps amorti, mais c’est faire peu de cas du facteur temps
qui implique que cet outillage avait dû être renouvelé.
Il
faut prendre en compte aussi l’évolution du grand public, que les services
marketing des constructeurs ont fini par convaincre de l’importance
essentielle de gadgets de plus en plus nombreux et de plus en plus sophistiqués
à bord des voitures, alors que la 2 CV persistait dans une voie différente.
C’est encore un des paradoxes de la 2 CV que d’être ainsi la victime
du marketing contemporain alors qu’elle fut la première automobile définie
à partir d’une enquête marketing. Il est vrai que, depuis lors, le marketing
et ses méthodes ont bien changé ; les besoins étant réputés
satisfaits, on joue plutôt sur les désirs et les envies.
Enfin,
au bout de 42 ans, les hommes ayant eux aussi changé chez Citroën, il semble
qu’on n’ait plus guère cherché à prolonger une vie qu’on trouvait déjà
bien longue.
La
2 CV était pour ceux-là une voiture du passé qui ne justifiait plus ni
publicité ni effort commercial. Certains allèrent jusqu’à en faire un credo
négatif : pas de passéisme ! Sans prendre conscience que c’était
peut-être là renier une tradition d’ingéniosité, d’innovation et de créativité.