La SAHARA

 

Au début de mars 1958, Citroën convie un aréopage de journalistes et d’officiels à la mer de sable d’Ermenonville pour leur présenter un nouveau et curieux petit véhicule, la 2 CV 4 x 4 Sahara. L’endroit est choisi en raison de ses dunes… lointaines cousines des vraies, celles de l’Algérie. Pour l’ambiance et la couleur locale, on a fait appel à des dromadaires trouvés on ne sait où, un cirque certainement. Mais une abondante chute de neige imprévue vient de recouvrir les dunes d’un manteau blanc qui rappelle plus le Gobi que le Sahara. Qu’importe, on fera avec !

 

La 2 CV 4 x 4 a pour origine la ténacité d’un certain M. Bonnafous, ingénieur des Travaux publics, qui, à la recherche d’un engin tout terrain léger et économique, avait délaissé sa Jeep pour se construire une 2 CV 4 x 4 en 1954. Au moteur de 375 cm3, il avait adjoint un second groupe à l’arrière, bientôt remplacés par deux moteurs plus puissants de 425 cm3.

 

    

 

Citroën eut vent de la voiture, s’y intéressa et décida de commercialiser sa propre version, principalement pour les champs pétrolifères. Le remarquable dans cette aventure c’est que, par l’opération du Saint-Esprit du ministère des Finances, la voiture à deux moteurs de 2 CV chacun, devint une 5 CV… Pour le gouvernement, 2 + 2 = 5 !

 

    

Les caractéristiques essentielles de la Sahara peuvent se résumer comme suit :

 

  • Deux groupes, un mototracteur et un motopropulseur de 2 CV normale montés séparément à l’avant et à l’arrière. Moteur arrière logé dans le coffre. Les deux moteurs sont absolument identiques à celui de la 2 CV normale ; ils développent une puissance unitaire de 13 ch (SAE) à 4 500 tr/mn et leur couple maximum de 2,4 mkg est fourni pour tous les régimes compris entre 2 500 et 3 500 tr/mn. Leur allumage est assuré par deux bobines. Ils sont alimentés par un carburateur Solex spécial 26 CBIN avec gros épurateur d’air à bain d’huile. Les deux dynamos chargent par l’intermédiaire de régulateurs séparés la batterie commune de 6 V et 60 Ah

  • Absence de liaison mécanique de transmission entre les deux moteurs, mais commande commune de l’accélérateur. L’accélération est assurée par un câble entre les deux carburateurs, câble commandé par la pédale des gaz. Les carburateurs s’ornent de grosses poulies sur lesquelles passent lesdits câbles. Les starters à deux degrés de chacun des carburateurs sont commandés par des boutons individuels.

  • De l’embrayage : Les mouvements de la pédale d’embrayage sont transmis en partie par voie hydraulique et en partie par voie mécanique. La pédale agit sur un cylindre qui transmet les mouvements par une conduite d’huile à un cylindre de commande avant ; l’embrayage arrière est actionné par une liaison mécanique. Le réglage du jeu s’effectue directement sur les leviers de rappel des plateaux de serrage.

  • Du changement de vitesse par pédales ordinaires et levier central. Selon que l’on désire circuler avec un ou deux moteurs, la boîte arrière est enclenchée ou mise au point mort. La commande des changements de vitesse est assurée par un levier central pourvu d’un fort dispositif d’arrêt. Une manette, que l’on ne peut actionner que dans la position de point mort de la boîte avant, permet d’accoupler ou de découpler la commande de la boîte arrière. La boîte avant ne peut être déclenchée. Lorsqu’on roule avec un moteur, c’est d’ordinaire celui de devant ; mais on peut, en cas de panne, se servir du moteur arrière, en pontant l’embrayage avant à l’aide d’une barre spéciale qui le desserre.

  • Moteur arrière et entraînement correspondant des roues déclenchables. Marche possible sur route avec le moteur avant seulement (au besoin aussi avec le moteur arrière seulement).

  • La plate-forme du châssis est renforcée de tôles avant et arrière protégeant les moteurs et agissant à la manière de skis ; des pare-chocs tubulaires renforcés complètent cette protection. Des brides de remorquage sont fixées à l’avant et à l’arrière.

  • La suspension à roues indépendantes a été reprise de la 2 CV : les roues sont guidées par des bras oscillants dont les centres de rotation se situent à l’intérieur des cotes d’empattement. De chaque côté du véhicule, les deux bras oscillants agissent sur deux ressorts hélicoïdaux horizontaux à interaction : lorsqu’une roue avant se soulève, par exemple, la roue arrière située du même côté s’appuie plus fortement sur le sol. Cette suspension présente l’avantage de ne transmettre à la plate-forme du châssis et à la carrosserie que des forces minimes ; elle se distingue en outre par la grande amplitude de ses débattements et par l’extrême élasticité de ses ressorts. Qualités d’une grande importance pour un véhicule tout terrain, car même dans les positions extrêmes, elles garantissent une adhérence favorable des pneus.

  • La carrosserie ne diffère que très peu de celle de la 2 CV normale. Le moteur arrière est logé dans le coffre, et de grosses manches en matière synthétique évacuent l’air de refroidissement. Un orifice circulaire aménagé dans la paroi oblique arrière permet de voir le ventilateur. Pour le reste, on retrouve les panneaux latéraux avec les quatre portes. À souligner la présence d’ouvertures dans les portes avant laissant passer les orifices de remplissage des réservoirs d’essence, munis eux-mêmes d’un joint en caoutchouc. Même dans les positions fortement inclinées, l’essence ne peut se déverser à l’intérieur de la carrosserie.

La roue de secours est fixée sur le capot avant.


L’équipement

L’équipement comprend un système de chauffage et dégivrage efficace et des rembourrages de sécurité des sièges avant en caoutchouc. Au lieu d’un entraînement combiné à celui de l’indicateur de vitesse, les essuie-glaces du modèle Sahara possèdent un moteur électrique, à cause des vitesses relativement basses pratiquées sur le terrain.


Les roues

Les roues sont d’un diamètre supérieur à celles de la 2 CV normale. Pneus Michelin X de 155 x 400 gonflés à 700 g seulement. Ces roues plus grandes augmentent la garde au sol et diminuent la pression spécifique des pneus sur le sol. Ces pneus suffiraient à supporter une charge de 800 kg par essieu ; or, elle était au maximum de 570 kg.


Confort

La puissance de 26 ch, sa carrosserie 4-places et sa charge utile de 300 kg faisaient de la 2 CV Sahara le plus petit véhicule tout terrain. De plus, avec sa carrosserie à quatre portes robuste, éprouvée et étanche, elle offrait un confort exceptionnel grâce à sa suspension particulière.


Production

La production de la 2 CV 4 x 4 fut faible : 694 unités.

1960     :    20

1961     :  274

1962     :  112

1963     :    87

1964     :  138

1965     :   35

1966     :   27